Nous écouter !
Clap Ciné du 9 octobre
Publié le 9 octobre, 2024

«Quand vient l’automne»

Une fois encore le très prolifique François Ozon exerce son talent de metteur en scène et de narrateur avec subtilité, délicatesse et sensibilité, avec toujours cette fausse indolence et son sens du deuxième degré dans le développement des personnages, si richement ambigus.

Michelle vit une retraite paisible dans sa jolie maison de Bourgogne.  Elle passe son temps entre la lecture, l’entretien de son jardin et les promenades en forêt avec sa meilleure amie Marie-Claude qu’elle accompagne aussi quelquefois à la prison où son fils Vincent est incarcéré . 

Ce jour-là, elle attend sa fille Valérie qui lui  amène son petit fils Lucas pour quelques jours de vacances.  Mais intoxiquée par des champignons servis par sa mère, Valérie la déclare dangereuse et repart à Paris avec son fils …

Michelle en éprouve beaucoup de tristesse mais on comprend aussi que l’attitude agressive de Valérie à l’égard de sa mère relève d’un secret familial bien antérieur.  D’autre part, Vincent sort de prison et essaie de se réinsérer dans la société.  Michelle va lui proposer de travailler pour elle puis va l’aider à réaliser son projet : ouvrir un bar tabac … D’autres événements surviendront un peu plus tard qui feront évoluer progressivement les comportements des personnages qui ne sont pas tels qu’ils apparaissent au départ mais c’est tout l’art de François Ozon de créer de fausses pistes et de cultiver les faux semblants.

Le thème principal du film est la culpabilité, qui apparaît à différents niveaux des relations entre les personnages et de leur propre histoire.  De quoi sont-ils donc respectivement coupables ?

En cela Ozon crée un certain suspense et force le mystère.                                    Mais quoi qu’il en soit, il leur donne une vraie humanité et on éprouve à leur égard une très naturelle empathie.

Avec Hélène Vincent et Josiane Balasko, attachantes dans leur rôle de vieilles dames à la retraite et aussi Ludivine Sagnier, Pierre Lottin et Sophie Guillemin.

« TKT » (« T’inquiète » en formule SMS)

C’est le troisième long métrage de la réalisatrice belge Solange Cicurel, après « Faut pas lui dire » (2016) qui lui valut un Magritte du meilleur film et « Adorables » (2020).

Elle adapte ici le roman « Tout ira bien » de l’écrivaine belge Elena Tenace mais s’inspire aussi des nombreuses rencontres et interviews faites pendant la phase de préparation du film.

S’éloignant de ses premiers sujets de comédie, elle traite ici un thème dramatique : le harcèlement en milieu scolaire.

Au début du film, Emma, 16 ans, est admise dans l’unité de soins intensifs d’un hôpital.  Ses parents attendent anxieusement des nouvelles du médecin.  Étrangement, Emma est pleinement consciente du monde qui l’entoure mais est incapable de communiquer avec lui.

Pour comprendre ce qu’il s’est passé, Solange Cicurel fait apparaître le double d’Emma, une sorte de fantôme qui devient le véritable personnage du film, qui va revivre les moments qui précèdent et nous faire comprendre pourquoi et comment elle en est arrivée là.

A partir de là, Solange Cicurel décortique la mécanique infernale du harcèlement et ses imprévisibles conséquences.  En mêlant fantastique et réalité, elle rompt avec le film d’adolescents traditionnel et adopte une démarche plus analytique que romancée.

« TKT » n’est pas un réquisitoire et n’est le résultat d’aucun jugement péremptoire.  Il consiste en un questionnement habilement distillé et appelle, implicitement et clairement à une prise de conscience fondamentale : ce qui arrive à Emma, jeune fille bien dans sa peau, sensible, intelligente, entourée de parents aimants, peut arriver à n’importe qui : il suffit d’un SMS blessant et un peu cruel, puis de petits signes accumulés et répétitifs et le mal est fait – jusqu’au drame possible.

Dans le rôle des parents Emilie Dequenne et Stéphane De Groodt entourent avec une juste émotion la jeune Lanna de Palmaert dont c’est le premier rôle au cinéma. Et elle est très convaincante.

André CEUTERICK

Clap Ciné du 9 octobre
Publié le 9 octobre, 2024

«Quand vient l’automne»

Une fois encore le très prolifique François Ozon exerce son talent de metteur en scène et de narrateur avec subtilité, délicatesse et sensibilité, avec toujours cette fausse indolence et son sens du deuxième degré dans le développement des personnages, si richement ambigus.

Michelle vit une retraite paisible dans sa jolie maison de Bourgogne.  Elle passe son temps entre la lecture, l’entretien de son jardin et les promenades en forêt avec sa meilleure amie Marie-Claude qu’elle accompagne aussi quelquefois à la prison où son fils Vincent est incarcéré . 

Ce jour-là, elle attend sa fille Valérie qui lui  amène son petit fils Lucas pour quelques jours de vacances.  Mais intoxiquée par des champignons servis par sa mère, Valérie la déclare dangereuse et repart à Paris avec son fils …

Michelle en éprouve beaucoup de tristesse mais on comprend aussi que l’attitude agressive de Valérie à l’égard de sa mère relève d’un secret familial bien antérieur.  D’autre part, Vincent sort de prison et essaie de se réinsérer dans la société.  Michelle va lui proposer de travailler pour elle puis va l’aider à réaliser son projet : ouvrir un bar tabac … D’autres événements surviendront un peu plus tard qui feront évoluer progressivement les comportements des personnages qui ne sont pas tels qu’ils apparaissent au départ mais c’est tout l’art de François Ozon de créer de fausses pistes et de cultiver les faux semblants.

Le thème principal du film est la culpabilité, qui apparaît à différents niveaux des relations entre les personnages et de leur propre histoire.  De quoi sont-ils donc respectivement coupables ?

En cela Ozon crée un certain suspense et force le mystère.                                    Mais quoi qu’il en soit, il leur donne une vraie humanité et on éprouve à leur égard une très naturelle empathie.

Avec Hélène Vincent et Josiane Balasko, attachantes dans leur rôle de vieilles dames à la retraite et aussi Ludivine Sagnier, Pierre Lottin et Sophie Guillemin.

« TKT » (« T’inquiète » en formule SMS)

C’est le troisième long métrage de la réalisatrice belge Solange Cicurel, après « Faut pas lui dire » (2016) qui lui valut un Magritte du meilleur film et « Adorables » (2020).

Elle adapte ici le roman « Tout ira bien » de l’écrivaine belge Elena Tenace mais s’inspire aussi des nombreuses rencontres et interviews faites pendant la phase de préparation du film.

S’éloignant de ses premiers sujets de comédie, elle traite ici un thème dramatique : le harcèlement en milieu scolaire.

Au début du film, Emma, 16 ans, est admise dans l’unité de soins intensifs d’un hôpital.  Ses parents attendent anxieusement des nouvelles du médecin.  Étrangement, Emma est pleinement consciente du monde qui l’entoure mais est incapable de communiquer avec lui.

Pour comprendre ce qu’il s’est passé, Solange Cicurel fait apparaître le double d’Emma, une sorte de fantôme qui devient le véritable personnage du film, qui va revivre les moments qui précèdent et nous faire comprendre pourquoi et comment elle en est arrivée là.

A partir de là, Solange Cicurel décortique la mécanique infernale du harcèlement et ses imprévisibles conséquences.  En mêlant fantastique et réalité, elle rompt avec le film d’adolescents traditionnel et adopte une démarche plus analytique que romancée.

« TKT » n’est pas un réquisitoire et n’est le résultat d’aucun jugement péremptoire.  Il consiste en un questionnement habilement distillé et appelle, implicitement et clairement à une prise de conscience fondamentale : ce qui arrive à Emma, jeune fille bien dans sa peau, sensible, intelligente, entourée de parents aimants, peut arriver à n’importe qui : il suffit d’un SMS blessant et un peu cruel, puis de petits signes accumulés et répétitifs et le mal est fait – jusqu’au drame possible.

Dans le rôle des parents Emilie Dequenne et Stéphane De Groodt entourent avec une juste émotion la jeune Lanna de Palmaert dont c’est le premier rôle au cinéma. Et elle est très convaincante.

André CEUTERICK