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Clap Ciné du 19 juin
Publié le 21 juin, 2024

«Frères ».

C’est le deuxième long métrage de Olivier Casas, après « Baby Phone » en 2017. Le film vaut prioritairement – essentiellement – par le côté incroyable et extraordinaire de l’histoire vraie dont il s’inspire : celle de deux frères abandonnés par leur mère après la seconde guerre mondiale.

En 1948, Patrice et Michel sont placés dans une famille d’accueil.  Après le suicide du père du foyer, ils se réfugient dans la forêt où ils vont vivre (survivre) seuls pendant 7 ans, sans aucune aide extérieure.

Le réalisateur construit son film sur deux temporalités, en passant du récit du passé à la réalité actuelle.  Ainsi, après la mise en situation initiale, on retrouve Michel aujourd’hui qui apprend que son frère a disparu alors qu’il était au Canada.  Il part à sa recherche.

Puis, le film revient dans le passé quand les deux enfants se construisent un campement dans la forêt.  Par la suite, retour au présent, quand Michel atterrit au Québec et va interroger les habitants du village où Patrice a été aperçu pour la dernière fois.  Retour sur les enfants dans la forêt, et ainsi de suite.  Grâce à ces allers et retours entre le passé et l’époque moderne, Olivier Casas réussit à bien exprimer cette véritable osmose entre les deux frères, depuis leur enfance tragique jusqu’à leur situation actuelle.  Une sorte d’union fusionnelle marquée dans le temps de manière indélébile.  Mais entre eux, il y a aussi le poids d’un lourd secret lié à ce qui a dû se passer il y a si longtemps dans cette forêt où ils ont peut-être laissé leur âme.

C’est Yvan Attal et Mathieu Kassovitz, duo inédit de deux acteurs charismatiques qui associent leurs forces et leurs fragilités respectives pour donner toute l’intensité dramatique à ces deux personnages hors du commun.

«Maria»

Après « Revenir », son excellent premier film en 2018, Jessica Palud adapte, de manière libre et personnelle le livre de Vanessa Schneider « Tu t’appelais Maria Schneider », paru en 2018.  Vanessa Schneider, la cousine de l’actrice, raconte Maria Schneider, à partir de son propre regard.  Un témoignage fort, sincère, poignant.

Au contraire, Jessica Palud concentre tout le propos de son film sur l’actrice elle-même, dont elle saisit les moindres gestes, regards, émotions, à partir de l’âge de 16 ans, quand elle va rencontrer pour la première fois, son père géniteur Daniel Gélin, sur un plateau de cinéma.  Elle le revoit, s’intéresse à lui, éprouve une certaine estime à son égard ce qui rend sa mère folle de rage et la chasse de chez elle.  Elle se réfugie alors chez son oncle, le psychanalyste Michel Schneider, le père de Vanessa.

Fascinée par le cinéma, elle force la porte d’un producteur puis un peu plus tard rencontre le jeune metteur en scène italien Bernardo Bertolucci, qui cherche le premièr rôle féminin de son prochain film, « Le dernier Tango à Paris ».  A 20 ans, Maria devient la partenaire de l’un des plus grands acteurs du monde, Marlon Brando … Du film lui-même, réputé sulfureux, mais aussi devenu culte dans l’Histoire du cinéma, Jessica Palud ne dit pas grand chose, s’attardant essentiellement sur la fameuse scène de la « sodomie au beurre », qui ne figurait pas dans le scénario lu par la jeune actrice mais que Bertolucci avec la complicité de Brando, a ajouté à la dernière minute, à l’insu de Maria pour obtenir d’elle, dira Bertolucci, une rage authentique et de véritables larmes ». Maria a vécu la scène comme un véritable viol, qui la fragilisera jusqu’à une vraie descente aux enfers.

Jessia Palud entend ici dénoncer le traitement infligé à Maria, et, de manière plus globale aux femmes dans le cinéma, surfant vraisemblablement sur la vague Me Too. Elle rappelle aussi, à juste titre que Maria Schneider, belle, ingénue, s’était innocemment insurgée contre une industrie faite « par des hommes, pour des hommes » mais où on ne retrouve pas la femme-actrice excessive, volcanique et meurtrie dont parle Vanessa Schneider dans son livre.

Un film de « bons sentiments » donc mais en demi-teinte, dont on retiendra au passage la stupéfiante interprétation de Matt Dillon, si Brando de l’époque et la lumineuse mais peut-être trop sage prestation de Anamaria Vartolomei.                                                                                                     

André CEUTERICK

Clap Ciné du 19 juin
Publié le 21 juin, 2024

«Frères ».

C’est le deuxième long métrage de Olivier Casas, après « Baby Phone » en 2017. Le film vaut prioritairement – essentiellement – par le côté incroyable et extraordinaire de l’histoire vraie dont il s’inspire : celle de deux frères abandonnés par leur mère après la seconde guerre mondiale.

En 1948, Patrice et Michel sont placés dans une famille d’accueil.  Après le suicide du père du foyer, ils se réfugient dans la forêt où ils vont vivre (survivre) seuls pendant 7 ans, sans aucune aide extérieure.

Le réalisateur construit son film sur deux temporalités, en passant du récit du passé à la réalité actuelle.  Ainsi, après la mise en situation initiale, on retrouve Michel aujourd’hui qui apprend que son frère a disparu alors qu’il était au Canada.  Il part à sa recherche.

Puis, le film revient dans le passé quand les deux enfants se construisent un campement dans la forêt.  Par la suite, retour au présent, quand Michel atterrit au Québec et va interroger les habitants du village où Patrice a été aperçu pour la dernière fois.  Retour sur les enfants dans la forêt, et ainsi de suite.  Grâce à ces allers et retours entre le passé et l’époque moderne, Olivier Casas réussit à bien exprimer cette véritable osmose entre les deux frères, depuis leur enfance tragique jusqu’à leur situation actuelle.  Une sorte d’union fusionnelle marquée dans le temps de manière indélébile.  Mais entre eux, il y a aussi le poids d’un lourd secret lié à ce qui a dû se passer il y a si longtemps dans cette forêt où ils ont peut-être laissé leur âme.

C’est Yvan Attal et Mathieu Kassovitz, duo inédit de deux acteurs charismatiques qui associent leurs forces et leurs fragilités respectives pour donner toute l’intensité dramatique à ces deux personnages hors du commun.

«Maria»

Après « Revenir », son excellent premier film en 2018, Jessica Palud adapte, de manière libre et personnelle le livre de Vanessa Schneider « Tu t’appelais Maria Schneider », paru en 2018.  Vanessa Schneider, la cousine de l’actrice, raconte Maria Schneider, à partir de son propre regard.  Un témoignage fort, sincère, poignant.

Au contraire, Jessica Palud concentre tout le propos de son film sur l’actrice elle-même, dont elle saisit les moindres gestes, regards, émotions, à partir de l’âge de 16 ans, quand elle va rencontrer pour la première fois, son père géniteur Daniel Gélin, sur un plateau de cinéma.  Elle le revoit, s’intéresse à lui, éprouve une certaine estime à son égard ce qui rend sa mère folle de rage et la chasse de chez elle.  Elle se réfugie alors chez son oncle, le psychanalyste Michel Schneider, le père de Vanessa.

Fascinée par le cinéma, elle force la porte d’un producteur puis un peu plus tard rencontre le jeune metteur en scène italien Bernardo Bertolucci, qui cherche le premièr rôle féminin de son prochain film, « Le dernier Tango à Paris ».  A 20 ans, Maria devient la partenaire de l’un des plus grands acteurs du monde, Marlon Brando … Du film lui-même, réputé sulfureux, mais aussi devenu culte dans l’Histoire du cinéma, Jessica Palud ne dit pas grand chose, s’attardant essentiellement sur la fameuse scène de la « sodomie au beurre », qui ne figurait pas dans le scénario lu par la jeune actrice mais que Bertolucci avec la complicité de Brando, a ajouté à la dernière minute, à l’insu de Maria pour obtenir d’elle, dira Bertolucci, une rage authentique et de véritables larmes ». Maria a vécu la scène comme un véritable viol, qui la fragilisera jusqu’à une vraie descente aux enfers.

Jessia Palud entend ici dénoncer le traitement infligé à Maria, et, de manière plus globale aux femmes dans le cinéma, surfant vraisemblablement sur la vague Me Too. Elle rappelle aussi, à juste titre que Maria Schneider, belle, ingénue, s’était innocemment insurgée contre une industrie faite « par des hommes, pour des hommes » mais où on ne retrouve pas la femme-actrice excessive, volcanique et meurtrie dont parle Vanessa Schneider dans son livre.

Un film de « bons sentiments » donc mais en demi-teinte, dont on retiendra au passage la stupéfiante interprétation de Matt Dillon, si Brando de l’époque et la lumineuse mais peut-être trop sage prestation de Anamaria Vartolomei.                                                                                                     

André CEUTERICK