« L’abbé Pierre » et « La passion de Dodin Bouffant » à l’affiche !
« La passion de Dodin Bouffant »
L’une des surprises du palmarès du dernier festival de Cannes où ce nouveau film du « revenant » Tran Anh Hung a été crédité du prix de la mise en scène. Mieux encore, le film vient d’être choisi pour représenter la France dans la première sélection des Oscars 2024 alors qu’on y attendait légitimement le remarquable « Anatomie d’une chute » de Justine Triet.
On avait un peu oublié le réalisateur franco-vietnamien, tombé en désuétude, après la Caméra d’Or à Cannes et le César du meilleur premier film pour « L’Odeur de la Papaye verte » (1993) et le Lion d’Or à Venise pour son deuxième long métrage « Cyclo » en 1995. Il a pourtant encore fait une dizaine de films par la suite mais sans grand succès.
Il adapte ici un roman du début du 20ème siècle « La vie et la passion de Dodin-Bouffant, gourmet » de Marcel Rouff (1924) qui raconte l’histoire d’un magistrat retraité du 19ème siècle, Dodin Bouffant qui consacre désormais sa vie à sa passion, la gastronomie et s’active en cuisine, avec Eugénie, une cuisinière hors pair à son service depuis 20 ans. Au fil du temps, est née entre eux une relation amoureuse, discrète, délicate, raffinée comme les plats savoureux qu’ils réalisent ensemble pour le grand plaisir des meilleurs amis de Dodin qui s’attardent régulièrement à sa table.
Avide de liberté, Eugénie n’a jamais voulu se marier avec Dodin, à qui elle cache aussi certains malaises d’une santé fragile.
Le film est un assez brillant exercice de style qui s’attarde sur la virtuosité culinaire des deux personnages principaux, et met aussi en exergue leur complicité amoureuse qui dépasse le cadre d’une relation traditionnelle.
Dans une mise en scène classique et soignée, Tran Anh Hung restitue l’ambiance et le décor de l’époque, sans beaucoup d’éloquence et de dialogues mais avec élégance et sincérité. Le duo Juliette Binoche – Benoît Magimel fonctionne à merveille.
« L’abbé Pierre » (une vie de combats)
Frédéric Tellier (« Goliath » – 2022) réalise un biopic riche, instructif, attachant sur l’Abbé Pierre, longtemps considéré comme la personnalité préférée des Français.
Une vie, un destin, une personnalité extraordinaire qu’il tente de reconstituer, en un peu plus de 2h00, à travers quelques moments forts, certains événements à portée historique et des réflexions d’une profonde humanité. Le film suit une progression chronologique, entre 1937 et 2007, quand il commença sa brève carrière dans les ordres, comme moine capucin, jusqu’à sa mort, à 94 ans.
Né dans une famille aisée, Henri Grouès a été à la fois résistant, député, défenseur des sans-abris, révolutionnaire et iconoclaste. Des bancs de l’Assemblée Nationale aux bidonvilles de la banlieue parisienne, son engagement inlassable et obstiné auprès des plus faibles lui a valu une renommée internationale. Parmi les faits les plus marquants, il y a eu, bien sûr, la création d’Emmaüs et son incroyable développement, son fameux appel de l’hiver 1954 au micro de Radio Luxembourg ou encore ce voyage éreintant en Amérique où il ne voulait parler ni de la France ni de la religion mais simplement comme un homme qui venait parler à d’autres hommes.
Frédéric Tellier évoque aussi ses fragilités, ses souffrances et cette inlassable révolte aux mille visages contre la misère et l’injustice. Il valorise aussi le personnage de Lucie Coutaz qu’il rencontra par hasard en 1942 quand il était entré dans la résistance et qui lui fit des faux papiers. Elle devint sa secrétaire, son assistante, sa confidente, sa « bonne raison » des choses et elle l’aida à créer puis à gérer cette formidable entreprise d’Emmaüs. Bien au-delà de l’homme d’église, Tellier montre un homme passionné, déterminé, obstiné à l’extrême, qui finira aussi par s’interroger sur sa foi et ses propres convictions.
Dans le rôle titre Benjamin Lavernhe, sociétaire de la Comédie Française réussit une composition dramatique assez époustouflante, qui appelle peut-être un prochain César du meilleur acteur. Avec à ses côtés Emmanuelle Bercot, qui était déjà dans « Goliath », l’an dernier;
André Ceuterick
« L’abbé Pierre » et « La passion de Dodin Bouffant » à l’affiche !
« La passion de Dodin Bouffant »
L’une des surprises du palmarès du dernier festival de Cannes où ce nouveau film du « revenant » Tran Anh Hung a été crédité du prix de la mise en scène. Mieux encore, le film vient d’être choisi pour représenter la France dans la première sélection des Oscars 2024 alors qu’on y attendait légitimement le remarquable « Anatomie d’une chute » de Justine Triet.
On avait un peu oublié le réalisateur franco-vietnamien, tombé en désuétude, après la Caméra d’Or à Cannes et le César du meilleur premier film pour « L’Odeur de la Papaye verte » (1993) et le Lion d’Or à Venise pour son deuxième long métrage « Cyclo » en 1995. Il a pourtant encore fait une dizaine de films par la suite mais sans grand succès.
Il adapte ici un roman du début du 20ème siècle « La vie et la passion de Dodin-Bouffant, gourmet » de Marcel Rouff (1924) qui raconte l’histoire d’un magistrat retraité du 19ème siècle, Dodin Bouffant qui consacre désormais sa vie à sa passion, la gastronomie et s’active en cuisine, avec Eugénie, une cuisinière hors pair à son service depuis 20 ans. Au fil du temps, est née entre eux une relation amoureuse, discrète, délicate, raffinée comme les plats savoureux qu’ils réalisent ensemble pour le grand plaisir des meilleurs amis de Dodin qui s’attardent régulièrement à sa table.
Avide de liberté, Eugénie n’a jamais voulu se marier avec Dodin, à qui elle cache aussi certains malaises d’une santé fragile.
Le film est un assez brillant exercice de style qui s’attarde sur la virtuosité culinaire des deux personnages principaux, et met aussi en exergue leur complicité amoureuse qui dépasse le cadre d’une relation traditionnelle.
Dans une mise en scène classique et soignée, Tran Anh Hung restitue l’ambiance et le décor de l’époque, sans beaucoup d’éloquence et de dialogues mais avec élégance et sincérité. Le duo Juliette Binoche – Benoît Magimel fonctionne à merveille.
« L’abbé Pierre » (une vie de combats)
Frédéric Tellier (« Goliath » – 2022) réalise un biopic riche, instructif, attachant sur l’Abbé Pierre, longtemps considéré comme la personnalité préférée des Français.
Une vie, un destin, une personnalité extraordinaire qu’il tente de reconstituer, en un peu plus de 2h00, à travers quelques moments forts, certains événements à portée historique et des réflexions d’une profonde humanité. Le film suit une progression chronologique, entre 1937 et 2007, quand il commença sa brève carrière dans les ordres, comme moine capucin, jusqu’à sa mort, à 94 ans.
Né dans une famille aisée, Henri Grouès a été à la fois résistant, député, défenseur des sans-abris, révolutionnaire et iconoclaste. Des bancs de l’Assemblée Nationale aux bidonvilles de la banlieue parisienne, son engagement inlassable et obstiné auprès des plus faibles lui a valu une renommée internationale. Parmi les faits les plus marquants, il y a eu, bien sûr, la création d’Emmaüs et son incroyable développement, son fameux appel de l’hiver 1954 au micro de Radio Luxembourg ou encore ce voyage éreintant en Amérique où il ne voulait parler ni de la France ni de la religion mais simplement comme un homme qui venait parler à d’autres hommes.
Frédéric Tellier évoque aussi ses fragilités, ses souffrances et cette inlassable révolte aux mille visages contre la misère et l’injustice. Il valorise aussi le personnage de Lucie Coutaz qu’il rencontra par hasard en 1942 quand il était entré dans la résistance et qui lui fit des faux papiers. Elle devint sa secrétaire, son assistante, sa confidente, sa « bonne raison » des choses et elle l’aida à créer puis à gérer cette formidable entreprise d’Emmaüs. Bien au-delà de l’homme d’église, Tellier montre un homme passionné, déterminé, obstiné à l’extrême, qui finira aussi par s’interroger sur sa foi et ses propres convictions.
Dans le rôle titre Benjamin Lavernhe, sociétaire de la Comédie Française réussit une composition dramatique assez époustouflante, qui appelle peut-être un prochain César du meilleur acteur. Avec à ses côtés Emmanuelle Bercot, qui était déjà dans « Goliath », l’an dernier;
André Ceuterick