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Clap Ciné : Strange way of life et reality cette semaine dans les salles
Publié le 16 août, 2023

« Strange way of life » est un court métrage qui est diffusé « normalement en salle » soit de manière autonome, soit avec un complément de programme.

Un court métrage réalisé par Pedro Almodovar, un western d’une trentaine de minutes, en anglais, qui fut présenté de manière événementielle, par l’auteur lui-même au dernier festival de Cannes.

En abordant le genre du western, Almodovar s’aventure bien loin (au propre comme au figuré) de son univers habituel et semble vouloir s’imposer à lui-même un nouveau défi. Et il va jusqu’au bout de sa démarche en réalisant un véritable western où il témoigne d’une belle maîtrise de quelques codes du genre.

Au début du 20ème siècle, Jake est le shériff d’une petite ville de l’ouest américain.  Il est à la recherche d’un homme qui a tué une jeune femme il y a peu.  Silva, que Jake n’a plus vu depuis 25 ans arrive en ville. Les deux amis fêtent leurs retrouvailles et évoquent ce passé de quelques mois durant lesquels ils furent amants.  Ils couchent à nouveau ensemble mais Jake reprend ses esprits et poursuit la recherche du meurtrier de la victime, en réalité sa belle-sœur.  Et il apparaît aussi que Silva n’est pas venu en ville (ou pas seulement) pour retrouver son ancien amant.

Les principaux ingrédients sont là : l’ambiance et le décor de l’ouest américain des années 1900, l’intrigue « classique » d’un shériff qui doit rendre justice, un tueur qu’un témoin a entrevu et surtout deux magnifiques personnages jadis liés par une passion amoureuse mais devenus ennemis, l’un interprété par Ethan Hawke, grave et intense dans le rôle du shériff, l’autre par Pedro Pascal, vrai cowboy vengeur et sensible.

Un vrai western, fort, dense, émouvant d’une demi-heure.  On viendrait même à regretter que Almodovar n’ait pas osé un long métrage de ce qu’on peut traduire par « Etrange mode de vie ».

« REALITY »

Pour son premier long métrage, la cinéaste Tina Satter adapte, à la lettre, la retransmission d’un interrogatoire mené par le F.B.I : celui de Reality Winner, lanceuse d’alerte américaine condamnée le 23 août 2018, en application de l’Espionnage Act (cette loi édictée en 1917, à l’encontre des personnes qui portent atteinte, d’une manière ou d’une autre, à  la sécurité de l’État.  Elle a notamment concerné les Rosenberg au début des années 50 et plus près de nous Assange et Snowden).  C’est un tour de force, à la fois technique, visuel et même au niveau d’une vraie mise en scène de cinéma.

Le fait réel se passe le 3 juin 2017, quand deux agents du FBI appréhendent Reality Winner, alors qu’elle faisait ses courses.  Elle travaille pour la NSA, l’agence de sécurité nationale américaine.  Ils ont un mandat pour fouiller son domicile, après quoi commence un long interrogatoire intégralement enregistré (c’est la matière de base du film).

Au début, on suit une jeune femme ordinaire, apparemment banale, qui vit dans une petite maison peu aménagée, avec son chien et son chat.  Elle est coopérante, semble plutôt à l’aise au début de la discussion qui se déroule dans une pièce non occupée de l’habitation. Mais progressivement la gêne puis le trouble s’installent chez la jeune femme, mal à l’aise et fragilisée quand les agents  s’intéressent à la fuite de documents classifiés sur l’Internet, prouvant une ingérence russe dans les élections américaines.

Loin d’un artificiel exercice de style, Tina Satter exploite la matière cinématographique à sa disposition : l’espace (un huis clos dans une pièce vide), le personnage (dont elle capte les expressions et les signes émotifs les plus infimes), le contenu de l’interrogatoire lui-même auquel elle donne presque des allures de suspense voire de thriller d’espionnage) et tout ce qui peut, indirectement concerner l’aspect politique du sujet lui-même (notamment lié à la paranoïa trumpiste des organismes gouvernementaux).

Tina Satter démontre ainsi ce que peut le cinéma à partir d’un matériel aussi minimaliste que celui-ci.

André Ceuterick est à suivre chaque mercredi à 14h sur Sud Radio.

Clap Ciné : Strange way of life et reality cette semaine dans les salles
Publié le 16 août, 2023

« Strange way of life » est un court métrage qui est diffusé « normalement en salle » soit de manière autonome, soit avec un complément de programme.

Un court métrage réalisé par Pedro Almodovar, un western d’une trentaine de minutes, en anglais, qui fut présenté de manière événementielle, par l’auteur lui-même au dernier festival de Cannes.

En abordant le genre du western, Almodovar s’aventure bien loin (au propre comme au figuré) de son univers habituel et semble vouloir s’imposer à lui-même un nouveau défi. Et il va jusqu’au bout de sa démarche en réalisant un véritable western où il témoigne d’une belle maîtrise de quelques codes du genre.

Au début du 20ème siècle, Jake est le shériff d’une petite ville de l’ouest américain.  Il est à la recherche d’un homme qui a tué une jeune femme il y a peu.  Silva, que Jake n’a plus vu depuis 25 ans arrive en ville. Les deux amis fêtent leurs retrouvailles et évoquent ce passé de quelques mois durant lesquels ils furent amants.  Ils couchent à nouveau ensemble mais Jake reprend ses esprits et poursuit la recherche du meurtrier de la victime, en réalité sa belle-sœur.  Et il apparaît aussi que Silva n’est pas venu en ville (ou pas seulement) pour retrouver son ancien amant.

Les principaux ingrédients sont là : l’ambiance et le décor de l’ouest américain des années 1900, l’intrigue « classique » d’un shériff qui doit rendre justice, un tueur qu’un témoin a entrevu et surtout deux magnifiques personnages jadis liés par une passion amoureuse mais devenus ennemis, l’un interprété par Ethan Hawke, grave et intense dans le rôle du shériff, l’autre par Pedro Pascal, vrai cowboy vengeur et sensible.

Un vrai western, fort, dense, émouvant d’une demi-heure.  On viendrait même à regretter que Almodovar n’ait pas osé un long métrage de ce qu’on peut traduire par « Etrange mode de vie ».

« REALITY »

Pour son premier long métrage, la cinéaste Tina Satter adapte, à la lettre, la retransmission d’un interrogatoire mené par le F.B.I : celui de Reality Winner, lanceuse d’alerte américaine condamnée le 23 août 2018, en application de l’Espionnage Act (cette loi édictée en 1917, à l’encontre des personnes qui portent atteinte, d’une manière ou d’une autre, à  la sécurité de l’État.  Elle a notamment concerné les Rosenberg au début des années 50 et plus près de nous Assange et Snowden).  C’est un tour de force, à la fois technique, visuel et même au niveau d’une vraie mise en scène de cinéma.

Le fait réel se passe le 3 juin 2017, quand deux agents du FBI appréhendent Reality Winner, alors qu’elle faisait ses courses.  Elle travaille pour la NSA, l’agence de sécurité nationale américaine.  Ils ont un mandat pour fouiller son domicile, après quoi commence un long interrogatoire intégralement enregistré (c’est la matière de base du film).

Au début, on suit une jeune femme ordinaire, apparemment banale, qui vit dans une petite maison peu aménagée, avec son chien et son chat.  Elle est coopérante, semble plutôt à l’aise au début de la discussion qui se déroule dans une pièce non occupée de l’habitation. Mais progressivement la gêne puis le trouble s’installent chez la jeune femme, mal à l’aise et fragilisée quand les agents  s’intéressent à la fuite de documents classifiés sur l’Internet, prouvant une ingérence russe dans les élections américaines.

Loin d’un artificiel exercice de style, Tina Satter exploite la matière cinématographique à sa disposition : l’espace (un huis clos dans une pièce vide), le personnage (dont elle capte les expressions et les signes émotifs les plus infimes), le contenu de l’interrogatoire lui-même auquel elle donne presque des allures de suspense voire de thriller d’espionnage) et tout ce qui peut, indirectement concerner l’aspect politique du sujet lui-même (notamment lié à la paranoïa trumpiste des organismes gouvernementaux).

Tina Satter démontre ainsi ce que peut le cinéma à partir d’un matériel aussi minimaliste que celui-ci.

André Ceuterick est à suivre chaque mercredi à 14h sur Sud Radio.